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Yamauba et Kintarô

Yamauba et Kintarô
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Yamauba, portant Kintarô sur ses épaules, coiffe ses longs cheveux. Utamaro dans ce chef d’œuvre de la gravure exploite magistralement et avec l’aisance d’un calligraphe toute la richesse du trait : tracé léger, souple et sûr des contours du corps de la femme, tracé épais semblable à celui du pinceau pour le corps de l’enfant et celui du drapé, libre, ample et orné de gaufrage de feuilles et de vrilles. L’enroulement du corps s’achève par la chevelure en arabesque où la subtilité de la taille libère quelques cheveux, éclairant ainsi l’ensemble.
Edmond de Goncourt donne libre cours à son admiration pour ce genre d’estampe dans l’une de ses phrases : « En ces assemblages, en ces groupements de la mère et de l’enfant, où l’existence des deux êtres n’est pas encore séparée, et où des entrailles de la mère, la vie de l’enfant semble être passée sur ses genoux, sur ses épaules. » (Outamaro, 1891, p. 56.)
Le cadrage coupe volontairement l’image, accentuant ainsi la monumentalité et la vision en plan rapproché de la mère et de l’enfant, qui regarde au-delà de la feuille. La sobriété des couleurs noire, beige et rosée, réduites à trois, privilégie l’ampleur du graphisme.
Utamaro exécuta plus de cinquante estampes, la plupart de 1801 à 1804, sur le thème de Yamauba et Kintarô, très exploité par les artistes de l’ukiyo-e. Kintarô, « le garçon d’or », est le nom d’enfance d’un héros de contes populaires appelé Sakata no Kintoki, samouraï et fidèle compagnon du célèbre guerrier Minamoto no Yorimitsu. Il aurait vécu à l’époque Heian (794-1185).
La légende en fit le fils de Yamauba, la vieille femme sauvage de la montagne, personnage démoniaque vivant dans la région du mont Ashigara. Doté d’une force herculéenne, Kintarô luttait avec les ours et les bêtes sauvages. Devenu grand, il s’attaqua aux démons. Il apparut dans les récits chantés de jôruri et dans les pièces de kabuki, aux 17e et 18e siècles, sous le nom de Kaidômaru.
Le plus souvent, il est représenté enfant, énorme, armé d’une hache, domptant les bêtes féroces ou dans des scènes de tendresse avec sa mère. Les femmes attendant un bébé prient les kami, esprits divins du culte shintoïste, pour avoir un enfant aussi beau et fort que Kintarô.
Utamaro, interprétant le thème, a figuré la mère et l’enfant comme des êtres proches de la nature, dans des scènes de tendresse spontanée d’une rudesse touchante. Edmond de Goncourt fut séduit par ces feuilles et « ce marmot herculéen, à la peau couleur d’acajou, élevé par une femme à la tignasse noire, sauvagement échevelée. » (Outamaro, 1891, p. 46). (G. L.)

© Bibliothèque nationale de France

  • Date
    Vers 1801-1804
  • Auteur(es)
    Utamaro Kitagawa (1753-1806)
  • Description technique
    Signé : « Utamaro hitsu »
    Éditeur : Omiya
    Nishiki-e. Gaufrage sur le drapé. Format ôban. 375 x 250 mm
  • Provenance

    BnF, département des Estampes et de la Photographie, RESERVE DE-10, J. B. 502

  • Lien permanent
    ark:/12148/mm314200060g