Les Jeunes France, romans goguenards

Bibliothèque nationale de France
Grand chemin de la postérité, les romantiques en cortège
Dans cette caricature, Victor Hugo mène un cortège échevelé de journalistes et auteurs romantiques : Théophile Gautier, Cassagnac, Wey, Fouché, Eugène Sue, Lamartine, Alexandre Dumas, Soulié, Balzac, Gozlan, Delavigne, Alfred de Vigny, Alphonse Karr, Emile Bayard, Paul de Kock, Briffaut… Lamartine les surplombe.
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La première d’Hernani
Le 25 février 1830, la foule se presse pour assister à la première d’Hernani, drame romantique de Victor Hugo joué à la Comédie-Française. Entre applaudissements des romantiques et huées des classiques, le vacarme est tel que cette représentation a été qualifiée de « bataille ». Pressentant un accueil hostile, Hugo avait enjoint à ses amis écrivains et peintres de venir faire la claque lors de la première.
Chef de file des romantiques, Victor Hugo avait fait la lecture d’Hernani au salon de l’Arsenal de Nodier et dans son propre cénacle, rue Notre-Dame-des-Champs.
© Photo RMN-Grand Palais
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Les Jeunes France sont un recueil de nouvelles de Théophile Gautier paru en 1833 alors qu'il n'a que vingt-deux ans. L’expression « Jeunes France » est à la mode pour désigner les jeunes romantiques passionnés par l’art, enthousiastes et excessifs. Avec une ironie empreinte de tendresse, Gautier dépeint les mœurs de ces romantiques frénétiques, portant cheveux longs et barbe, et dont il a lui-même fait partie.
Des portraits humoristiques
L’expression « Jeunes France » est alors à la mode pour désigner les jeunes romantiques passionnés par l’art, enthousiastes et excessifs. Les six nouvelles du recueil retracent de façon humoristique les mœurs de ces romantiques frénétiques. « Sous la table » est, comme le précise son sous-titre, un « dialogue bachique sur plusieurs questions de haute moralité » : deux amis parlent de leurs maîtresses et discutent de la vertu en s’enivrant. « Onuphrius, ou les vexations fantastiques d’un admirateur d’Hoffmann », fait le portrait d’un « romantique forcené » qui vit dans un monde imaginaire construit d’après ses lectures et qui en devient fou. Ce personnage est inspiré notamment de la nouvelle « Le vase d'or » d'Hoffmann où le personnage est victime d'hallucinations.

Contes fantastiques
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« Daniel Jovard » raconte la « conversion d’un classique » à toutes les excentricités des Jeunes France : « de classique pudibond, qu’il avait été et qu’il était encore la veille, il devint par réaction le plus forcené jeune France, le plus endiablé romantique qui ait jamais travaillé sous le lustre d’Hernani ». « Celle-ci et celle-là, ou la Jeune France passionnée » expose comment un jeune homme s’amourache d’une belle aristocrate finalement très décevante, avant de trouver un amour authentique avec la modeste Mariette, qui représente « la vraie poésie, la poésie sans corset et sans fard ». Le « bol de punch » décrit une nuit d’« orgie échevelée ».

Cathédrale Notre-Dame, façade
La façade Ouest de style gothique de Notre-Dame de Paris est réalisée entre 1200 et 1250, sous le règne de saint Louis. Son orientation permet au maître-autel de recevoir chaque matin en premier la lumière du soleil. Cette façade en calcaire, entrée principale de la cathédrale, est presque symétrique. Elle mesure 43,5 mètres de large pour 45 mètres de haut.
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Enfin, le personnage éponyme d’« Élias Wildmanstadius » soumet sa vie quotidienne à la passion qu’il a pour le Moyen âge et Notre-Dame de Paris : « Il y a le jeune France artiste, le jeune France passionné, le jeune France viveur, chiqueur, fumeur, avec ou sans barbe, que certains naturalistes placent entre les pachydermes, d’autres dans les palmipèdes, ce qui nous paraît également fondé. Mais de toutes ces espèces de jeunes France, le jeune France Moyen Âge est la plus nombreuse ».
Enthousiasme et ironie
La fantaisie et l’ironie dominent l’écriture de cette satire des mœurs romantiques. Elles n’excluent pourtant pas la sympathie. L’émotion est également présente dans le recueil, par exemple quand Gautier apostrophe le lecteur à propos d’Elias Wildmanstadius : « Je vous prie, lecteur, de ne pas trop rire de lui ; car c’était mon ami, et il fut sincère dans sa folie, bien différent de tant d’autres qui ne le sont que par mode et par manière. » Le mélange de satire et de tendresse exprime cette « participation détachée » (P. Tortonese) qui définit l’attitude de Théophile Gautier, non seulement à l’égard du romantisme, mais de toute la littérature.
Provenance
Cet article provient du site Les Essentiels de la littérature (2017)
Lien permanent
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