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Berlioz en ses écrits

Grand traité d’instrumentation et d’orchestration modernes
Grand traité d’instrumentation et d’orchestration modernes


© bibliothèque municipale de Grenoble

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Grand compositeur, Berlioz est aussi un grand écrivain, maniant le verbe avec verve et fantaisie. Durant plus de quarante ans, le musicien se révèle un talentueux feuilletoniste de la vie musicale, à l’humour ravageur. Dans ses mémoires, son style fluide et riche, ses choix de mots originaux en font un littérateur à part entière, et un des meilleurs témoins du siècle du romantisme, friand de ce mélange des genres.  

Des critiques en feuilletons

Comptes-rendus de concerts, de créations lyriques et de manifestations officielles, biographies de compositeurs et d’interprètes, analyses d’œuvres et de traités, réflexions pédagogiques, esthétiques, voire sociologiques : la richesse des chroniques musicales de Berlioz est exceptionnelle. Dans le Journal des débats, le compositeur soutient ses idées réformatrices en matière d’orchestration et défend de nouveaux instruments, comme ceux d’Adolphe Sax.

Vignette publicitaire pour la Maison Adolphe Sax
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Bibliothèque nationale de France

Même en tournée à l’étranger, Berlioz adresse des billets qu’il appelle ses « bulletins de la grande armée » dont les lecteurs raffolent.

Rassemblant un choix de ses feuilletons, Berlioz crée une fiction originale : les musiciens bavardent en concert et s’amusent de la mauvaise musique qu’ils exécutent. Après Les Soirées de l’orchestre viennent deux autres volumes : Les Grotesques de la musique et À travers chants.

Les Soirées de l’orchestre

Cet ouvrage, publié en 1852, est un recueil de nouvelles déjà parues en feuilleton dans la presse, dont les sujets tournent autour de la musique. Le prétexte est le suivant : les musiciens d’un orchestre du nord de l’Europe ont l’habitude, « pendant l’exécution des opéras médiocres », de lire, d’étudier ou de se raconter des histoires à tour de rôle. « L’auteur » est le rapporteur et parfois lui-même le narrateur d’anecdotes et « petits romans ». Ces histoires plus ou moins longues, mélangeant la réalité et la fiction, souvent farfelues, sont l’occasion pour Berlioz de développer ses idées sur « l’état présent de la musique, ses défauts, ses malheurs et ses chagrins », et sur les musiciens, les chanteurs ou le public : « le public des trois quarts de l’Europe est à cette heure aussi inaccessible que les matelots chinois au sentiment de l’expression musicale ». On y trouve également une réflexion sur la critique, un article féroce sur l’administration de l’Opéra de Paris « amoureux fou de la médiocrité », des « esquisses biographiques » de Spontini et de Paganini, un hommage à Rossini et encore une longue et curieuse « nouvelle de l’avenir » située en 2344 (vingt-cinquième soirée), Euphonia ou la ville musicale, qui décrit une ville idéale entièrement consacrée à la musique, où les habitants – tous musiciens – se déplacent en ballon.

Les Grotesques de la musique

Portrait-charge de Berlioz
Portrait-charge de Berlioz |

(C) GrandPalaisRmn (musée d'Orsay) / Franck Raux

Édités en 1859 par A. Bourdilliat, directeur de la Librairie nouvelle, Les Grotesques de la musique empruntent sans doute leur titre aux Grotesques de Théophile Gautier (une série d’études publiées entre 1834 et 1836 portant sur des poètes mineurs du 17e siècle).
Comme Les Soirées de l’orchestre, Les Grotesques opèrent un choix dans des feuilletons précédemment écrits. Ici, les textes antérieurs s’échelonnent entre 1852 et 1859, bien que quelques articles, comme ceux des Voyages en France, aient été publiés en 1848.
Le 20 février 1859, la Gazette musicale annonce l’ouvrage ainsi : « Il faut découvrir les pensées sérieuses sous la forme ironique dont elles sont revêtues et au travers des âcres plaisanteries sous lesquelles l’auteur se plaît à les cacher ».
On retrouve dans Les Grotesques les mêmes thèmes que dans Les Soirées : l’administration lamentable de l’Opéra, la nullité de l’Opéra-Comique et une critique acerbe du monde ignorant qui tourne autour de la musique (critiques, amateurs, connaisseurs). Le talent et la virtuosité littéraires de Berlioz apparaissent là dans tout leur éclat.

L'évangéliste du tambour

Hector Berlioz, Les Grotesques de la musique
 
Je me suis souvent demandé : Est-ce parce que certaines gens sont fous qu'ils s'occupent de musique,...
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Le prophète du trombone

Hector Berlioz, Les Grotesques de la musique
 
Un troisième s'est passionné pour le trombone. Le trombone, selon lui, détrônera tôt ou tard et remplacera...
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On ne peut pas danser en mi

Hector Berlioz, Les Grotesques de la musique
 
Un danseur qui, en Italie, s'était élevé jusqu'aux nues, vient débuter à Paris ; il demande l'introduction,...
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Guerre aux bémols

Hector Berlioz, Les Grotesques de la musique
Une dame passionnée pour la musique entre un jour chez notre célèbre éditeur Brandus et demande à voir...
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À travers chants

À travers chants
À travers chants |

Bibliothèque nationale de France

À travers chants, publié en septembre 1862, est le dernier des trois recueils, après Les Soirées de l’orchestre et Les Grotesques de la musique, que Berlioz compose à partir d’articles écrits pendant les décennies précédentes, depuis 1834 jusqu’à 1862. La façon dont il confectionne son recueil, et en général ses écrits critiques ou autobiographiques, rend d’ailleurs difficile une datation exacte de chacun des textes : après avoir publié un article une première fois, il le fait paraître de nouveau, avec ou sans modifications, dans une autre publication, ou l’intègre à un autre recueil.

C’est dans ce volume que Berlioz a réuni ses principales études critiques sur deux compositeurs qu’il considère comme ses maîtres : Beethoven – dont l’analyse qu’il consacre aux symphonies fut d’abord publiés dans Le Correspondant, puis dans Le Voyage en Allemagne – et Gluck.

Le Grand traité d’instrumentation et d’orchestration modernes

La plus grande partie du texte du traité fut d’abord publiée sous la forme de seize livraisons ou feuilletons parus sous le titre De l’instrumentation dans la Revue et gazette musicale du 21 novembre 1841 au 17 juillet 1842.
« Tout corps sonore mis en œuvre par le compositeur est un instrument de musique ». Cette phrase dont on a souligné la modernité introduit les grandes catégories d’instruments dont Berlioz traite : instruments à cordes, instruments à vent dans lesquels il inclut les voix, instruments à percussion.

Grand traité d'instrumentation et d'orchestration modernes
Grand traité d'instrumentation et d'orchestration modernes |

Bibliothèque nationale de France

Grand traité d’instrumentation et d’orchestration modernes
Grand traité d’instrumentation et d’orchestration modernes |


© bibliothèque municipale de Grenoble

Cette démarche caractérise Berlioz, qui se place résolument dans une perspective à la fois historique (il rappelle l’usage de chaque instrument) et évolutive (il insiste constamment sur les innovations techniques possibles dues soit à ses contemporains soit à lui-même). À l’opposé de la démarche descriptive et limitée de Kastner, il développe, pour la première fois, les combinaisons de timbres possibles et toutes les ressources techniques et expressives de chaque instrument. Sa démonstration s’appuie sur soixante-six exemples musicaux empruntés aux œuvres de Gluck, Méhul, Spontini, Beethoven (les symphonies, les concertos pour piano, Fidelio), Meyerbeer, Halévy, Rossini et Berlioz lui-même, notamment la Symphonie fantastique, le Requiem, Roméo et Juliette, Lélio, Le Cinq Mai, la Symphonie funèbre et triomphale.

Le traité fut immédiatement traduit en diverses langues, allemand et italien. L’édition bilingue allemande de 1843 contient des ajouts empruntés à Mendelssohn et Haydn, initiative récusée par Berlioz pour ce dernier.
La deuxième édition de 1855 est augmentée d’un chapitre Instruments nouveaux, avec plusieurs rubriques concernant les saxophones, les saxhorns, les saxotrombas, les saxtubas, le concertina, l’orgue melodium d’Alexandre, les pianos et melodiums (à son prolongé) d’Alexandre et l’octobasse de Vuillaume. En appendice, Berlioz ajoute le texte Le Chef d’orchestre, théorie de son art, qui repose beaucoup sur son expérience personnelle. Il y développe les questions de battue et prône l’utilité du métronome.

Mémoires

Mémoires
Mémoires |

Bibliothèque nationale de France

Mémoires
Mémoires |

Bibliothèque nationale de France

Berlioz commence ses Mémoires à Londres en 1848. La préface est datée du 21 mars et le chapitre 59 qui devait alors être le dernier, du 18 octobre 1854. Par la suite, il ajoutera trois nouveaux chapitres de mise à jour – un « post-scriptum » daté du 25 mai 1856, une « postface » achevée en juillet 1854 et « Voyage en Dauphiné » (consacré à son amour platonique pour Estelle Fornier), daté du 1er janvier 1865. Berlioz compile et révise des textes déjà existants, publiés dans différents journaux et périodiques entre 1832 et 1844, ainsi que dans son premier livre, Voyage musical (1844). De fait, les chapitres entièrement nouveaux représentent moins de la moitié de l’ensemble.

L’auteur replonge dans ses souvenirs en ressuscitant les sentiments qu’il a éprouvés. Il décrit avec un lyrisme romantique ses émotions, ses enthousiasmes, le « spleen » qui l’envahit si souvent, tout en livrant ses réflexions sur la musique avec humour et vivacité.

La Côte-Saint-André

Hector Berlioz, Mémoires, chap. I
 
Je suis né le 11 décembre 1803 à La Côte-Saint-André, très petite ville de France, située dans le département...
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Apparition de Shakespeare. Miss Smithson

Hector Berlioz, Mémoires, chap. XVIII
Je touche ici au plus grand drame de ma vie. Je n'en raconterai point toutes les douloureuses péripéties....
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Ma légende de « La Damnation de Faust »

Hector Berlioz, Mémoires, chap. LIV
Ce fut pendant ce voyage en Autriche, en Hongrie, en Bohême et en Silésie que je commençai la composition...
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Provenance

Cet article a été publié à l’occasion de l’exposition « Berlioz, la voix du romantisme » présentée du 17 octobre 2003 au 18 janvier 2004 à la Bibliothèque nationale de France, en partenariat avec Arte, France Musiques et l'Orchestre de Paris-Mogador.

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