Le Décret rouge

La Brevis Relatio..., dont le texte avait été envoyé en nombre en Europe n'avait pas eu l'effet escompté, et la « Querelle des Rites » atteignait son paroxysme : le pape Clément XI avait condamné la position des jésuites en 1704, Mgr de Tournon, légat du pape auprès de l'empereur Kangxi avait été prié de quitter la Chine au plus vite en 1706, et Mgr Maigrot, vicaire apostolique, avait été exilé à Macao. Les Pères Antonio Barros et Antoine Beauvallier envoyés en mission à Rome par Kangxi en 1707 avaient fait naufrage au large du Portugal et on était sans nouvelles des Pères José Arxo et Antonio Provana envoyés à leur tour à Rome en 1708. Les autorités chinoises bannissaient les missionnaires qui interdisaient les rites chinois, et les différentes congrégations s'entredéchiraient.

Beaucoup moins célèbre, et beaucoup plus rare que la Brevis Relatio..., le « Décret rouge » n'est connu que par quelques exemplaires répertoriés, l'un à Londres, relié à la suite de l'Informatio pro veritate publiée à Canton en 1717, le second à Wolfenbüttel (Cod. Guelf 62.2 Extrav.), un autre à Stockholm, et celui-ci.
Indigné que son avis exprimé dans la Brevis Relatio... n'ait pas été suivi, l'empereur refuse de prendre en compte les décisions de Rome tant que ses envoyés ne seront pas revenus. Le pape venait en effet de condamner définitivement les jésuites en 1715 dans la bulle Ex illa die. Le décret s'adresse à tous, et particulièrement aux missionnaires nouvellement arrivés. Afin que nul n'ignore la loi, il est rédigé successivement en mandchou, en chinois et en latin, et le texte latin est contresigné, à la demande expresse de l'empereur, par seize missionnaires, dont quatorze jésuites. L'année suivante, un édit impérial interdira le christianisme, et en 1724, le successeur de Kangxi, Yongzheng (1723-1735) exilera les missionnaires.